Un soir d'automne, j'ai eu une idée. Il annonçait beau le lendemain... et c'était là une de mes dernières chances de faire une sortie photo sur la rivière en kayak pour aller voir les couleurs d'une perspective différente de celle qu'on peut observer du rivage. Sachant que les bernaches avaient déjà commencé à se réunir sur la rivière en vue de leur éventuel long départ pour le sud, je me doutais bien que j'allais avoir de bonnes opportunités photo avec elles également. Étant déjà allé vers l'ouest (vers Rosemère) un peu plus tôt durant l'été et je voulais voir des paysages différents... J'ai donc pris la décision d'aller vers l'est (vers Terrebonne) en sachant très bien qu'il y avait un peu plus de courant et d'eau vive de ce côté du pont de la route 335, puisque je suis allé souvent regarder et photographier les bernaches au bout de la 34e avenue. Donc je pars à l'aube juste avant le lever du soleil et je contourne l'île Garth à Bois-des-Filion pour aller saluer mon ami le castor grognon. Je l'appelle comme ça car la 1ère fois que je l'ai croisé, il m'a averti sans détour que je me trouvais trop près de sa hutte, d'une manière plutôt effrayante... Selon mon expérience, pour protéger leur territoire, les castors donnent des gros coups de queue dans l'eau pour effrayer les intrus qui s'approchent. Quand la rivière est calme et qu'il n'y a que le bruit de la pagaie qui brise ce silence, c'est assez surprenant quand on ne le voit pas venir dans la pénombre et qu'on ne s'y attend pas. Sachant que le castor peut tuer un homme assez facilement en lui mordant la cuisse pour couper l'artère qui y circule, j'étais resté assez bête, seul dans mon kayak sur l'eau, son environnement à lui... Disons que j'avais fait marche arrière quelque peu! "Pleine vapeur à reculons, moussaillons!" Donc cette fois, un peu plus courageux, mais tout de même sur mes gardes, je me suis gardé une bonne distance avec sa hutte pour contourner l'île. Juste comme je m'approchais, j'aperçus un sillon briser le calme de l'eau à plusieurs mètres de mon kayak, entre moi et sa hutte. C'était bien lui! Je me suis dit que j'était suffisamment loin de sa maison pour qu'il ne se fâche contre moi cette fois... Eh bien non! Il enfila les coups de queue pendant environ 10 minutes en venant vers moi mais sans toute fois s'approcher de trop près. Je trouvais qu'il avait le territoire large ce castor grognon! (Pour lire la suite, cliquez en bas à droite sur "Lire la suite")Avouez que c'est intimidant quand après il plonge et que vous ne savez pas s'il va bondir hors de l'eau juste à côté du kayak pour venir vous mordre la cuisse, très à l'abri dans un petit kayak qui est à... 4 pouce du niveau de l'eau!! Ha!! Dans la pénombre avant le lever du soleil de surcroît!! Bon, disons que je dramatise un brin... mais je vous dis que j'ai lâché la caméra assez vite et que je suis resté aux aguets avec la seule arme de défense potentielle que j'avais... ma pagaie! Donc étant un peu plus habitué cette fois ci, j'ai gardé mon sang froid et j'ai réalisé quelques clichés, à distance, de cette fameuse rencontre. Une petite frousse? Oui quelque peu, bien honnêtement, mais ce n'est pas de cette frousse que je parlais dans le titre de cet article, non! Restez avec moi et vous verrez un peu plus loin... Je poursuit donc ma route vers le pont Athanase-David de la route 335 et le soleil fini par se lever... Juste comme je contourne l'île Garth à l'est, j'aperçois les fameuses bernaches regroupées sur le rivage de l'île, attendant patiemment l'éveil de cet astre magnifique qu'est le soleil. Je fais quelques photos de ces dernières avant de me diriger vers le pont... Je m'engage donc sous le pont en me disant que, oui l'eau semble un peu plus agitée de ce côté, mais que ça va aller... Le soleil levé, disons que le calme de l'eau est disparu quelque peu pour céder sa place à un petit vent venant... de l'ouest. Donc je l'ai dans le dos à ce moment et je ne me doute de rien... Vient alors le point de non retour... ou plutôt, du point de retour difficile en Ta%*"!$! Bref je m'engage dans les "rapides", avec ma caméra et 2 lentilles, le tout très dispendieux... Et à ce moment j'ai comme un petit regret bizarre... Mais tout va bien, je suis dans le sens du courant alors je n'ai qu'à... éviter les roches! Et les tourbillons! Oh que je n'aime pas trop ça en ce moment, inutile de vous dire que je n'ai pas de photos de ce moment car j'avais réalisé qu'il était nettement plus sage de ranger ma caméra à ce moment! J'en ai une ci-bas où on peut voir que le courant est un peu plus agité mais ça ne représente pas très bien la réalité, il faut y être pour bien comprendre... C'est fort et subtil le courant! J'ai donc évité les roches le plus possible et une fois rendu près de la petite île que vous pouvez voir au loin à droite sur cette dernière photo, qui se nomme île Lamothe, j'ai été m'échouer sur une longue roche plate près des grosses roches noires sur le bord de l'île. Rien de trop grave encore puisque le courant ne pouvait plus m'entraîner à ce moment... Ouf, un répit! Par contre j'étais coincé entre deux de ces gros rochers et je devait reculer à contre courant pour les contourner afin de poursuivre mon chemin. J'ai donc profité de cette relative stabilité pour faire quelques photos de plus. Ensuite, à l'aide de ma pagaie j'ai réussi à me déloger malgré que car mon kayak montait et frottait sur plusieurs roches tellement le niveau de l'eau était anormalement bas en cette période de l'année. C'est fou le nombres de grosses roches qu'il y a dans le fond de cette rivière! Quand j'ai fini par continuer mon chemin dans des eaux un peu plus calmes vers le rivage nord, à gauche sur la dernière photo (vers Terrebonne) j'ai pu apprécier la vue de magnifiques saules pleureurs en bordure de l'eau. J'adore ces arbres, je les trouve grandioses avec leur longue branches feuillues. À ce moment j'était hors de danger mais il fallait bien que je retourne affronter le courant pour mon retour. Cette pause en compagnie des saules m'a permis de reprendre des forces avant d'avoir à remonter le courant. C'est maintenant le temps d'amorcer ma remontée du courant... Puisque je n'avais pas trop apprécié de passer du côté nord de la petite île Lamothe, j'ai décidé de passer du côté sud (près de Laval). Je me suis dirigé vers le côté opposé de la rivière pour me rendre compte que de ce côté, les choses n'étaient pas plus roses... Il y avait énormément de roches sous l'eau et je n'arrêtais pas de frapper ces roches avec ma pagaie, sans les voir. Ça brise un élan assez vite! Tant qu'il n'y avait pas trop de courant, ça allait, mais dès que je suis arrivé près du bout ouest de l'île, les choses se sont corsées. Je tente de pagayer rapidement pour avancer contre le courant qui est à son plus fort à cet endroit, mais au même moment je frappe encore un roche. Elle était si longue que je n'avais pas plus de 8 pouces d'eau pour pagayer de chaque côté du kayak, et ce, pendant quelques mètres. Je me souviens m'être dit à ce moment que je n'y arriverais pas, que ça prenait absolument des grands coups de pagaie profonds pour réussir à avancer dans ce courant relativement fort. J'ai donc dû pagayer "à l'horizontale" le plus fort et le plus vite possible pour réussir à avancer. Avancer est un bien grand mot ici car quand je fixais l'île du regard, je ne bougeait presque pas! Du sur place! Je me suis alors dit que si ça ne fonctionnait pas mieux que cela d'ici quelques minutes, j'allais devoir abandonner et trouver un rivage pour aller accoster et revenir à pied pour une très longue marche (que Google maps estime à 45 minute) jusqu'à mon véhicule et ensuite revenir chercher mon kayak abandonné sur le rivage. Il n'était quand même pas question de tirer mon kayak sur 4-5 km sur l'asphalte... Donc je pagaie de façon acharnée et ce n'est que le début... "Go tu es capable!" que je me dis. J'ai dû m'échouer sur 3 ou 4 autres rochers en eau peu profonde en chemin. Le problème, c'est que je n'ai pas d'autres roches ou rivage pour pousser avec ma pagaie afin de me déloger. Du gros plaisir quoi! Il faut donner des coups de hanches pour s'aider, en plus de pagayer fort! Quand j'étais fatigué, pas de pause possible, je reculais dans le courant! Alors j'ai dû maintenir ce rythme durant environ 25 minutes intensives pour remonter la section d'eau vive qui devait couvrir pas plus de 500-600 mètres de long. J'ai dû apprendre à "lire" l'eau assez vite et je me suis rapidement rendu compte que quand l'eau fait de belles petites cascades, c'est qu'il y a du courant, certes, mais aussi des roches juste en dessous qui crées ces remous! "Obstacle droit devant! On change de cap!" Mais où passer, il y en a partout! On garde le moral! Ça va finir par se terminer bientôt... À ce moment, j'ai mal aux épaules... vraiment. Pas question d'abandonner ici, le plus dur est passé! Je vois le pont s'approcher tranquillement, et je me dis que dès que j'arriverai sous le pont je serai sain et sauf, en eau calme. Erreur! Le vent s'était levé depuis le lever du soleil et comme mentionné plus tôt, il soufflait contre moi. J'ai donc dû maintenir cette cadence de coups de pagaie jusqu'à l'île Garth, où je retrouve ces chères bernaches... Enfin sorti du pétrin!! Disons que je ne m'y aventurerai plus, de ce côté du pont sur la rivière. Alors j'ai recommencé à faire des photos, quand tout à coup, venu de nulle part, je regarde derrière moi et je vois venir à bon rythme, un monsieur assez âgé, disons dans la soixantaine, qui file à toute allure dans ce qui semble être un canot très petit et étroit, comme un vieux modèle de compétition qui aurait pu servir aux olympiques? Il fonce droit devant, dans ma direction. On voit qu'il est expérimenté car pagayer un canot en ligne droite, surtout à cette vitesse, avec une seule rame requiert une certaine expertise. Il semble si concentré que je l'attends, me disant que ça ferait une belle photo. J'ai peur qu'il me dévisage en me voyant pointer ma caméra vers lui... On est seuls sur la rivière. D'où vient-il? A-t-il remonté la même section d'eau vive que moi? J'en doute mais il semble s'entraîner de cette façon régulièrement... Je le regarde passer, il ne me regarde même pas. Je prend 2-3 photos. Il file comme un train. Moi qui suit épuisé de ma longue remonté, je me dis que je vais tenter de le suivre. Après tout, il est beaucoup plus vieux que moi, je ne devrais pas avoir tant de misère que ça! Eh bien je n'ai jamais été capable de le rattraper ou de le suivre. En forme le bonhomme! Respect! Ou plutôt était-ce moi, qui était passablement amoché de mon périple... Quelle aventure! Voici ma très modeste embarcation... Une fois revenu à bon port. Ouf! Tout un périple!
2 Commentaires
Suzanne Bougie
11/22/2016 09:15:37 am
Ouais, toute une aventure! Tes photos sont magnifiques et tu as ressenti un surplus d'adrénaline qui met du piquant dans le quotidien, mais cela valait-il la peine de risquer d'endommager tout ton matériel photo? Enfin, tu t'en es bien sorti et c'est le principal. Bravo!
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Jonathan Bougie-Lauzon
11/22/2016 04:23:59 pm
Eh bien je crois que ça en valait la peine oui car la vie est plus excitante quand on y ajoute des aventures de la sorte! J'étais assez confiant de ne pas chavirer donc pour le matériel, ça ne me stressait pas tant, mais évidemment j'aurais bien pu avoir à nager après une collision avec une roche dans le courant... J'aurais juste eu à accoster ailleurs dans le meilleur des cas mais la journée aurait été longue! :-)
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Laisser une réponse.Auteur / authorJe suis un passionné de photographie depuis 2012 et j'aime surtout photographier des événements sportifs car je préfère les photos d'action, mais j'aime tout type de photos qui créent en moi un émerveillement. Capturer la beauté des paysages et faire des portraits sont aussi parmi mes styles de photos préférés. sujetsArchives
Mars 2019
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